Le mouvement des gilets jaunes : pour une nouvelle forme de mobilité

Depuis le 17 novembre 2018 le mouvement des gilets jaunes s’est organisé en France. Il s’agit au départ d’une protestation contre l’augmentation de la taxe carbone. Celle-ci devait avoir pour objectif de lutter contre le réchauffement climatique en poussant les automobilistes à moins rouler. Elle a surtout été perçue comme une nouvelle taxe injuste qui venait impacter le budget des Français qui n’ont d’autre choix que de prendre leur voiture (notamment dans les zones périurbaines et rurales).

 

Ce mouvement social a pris plusieurs formes, comme l’occupation des ronds-points, le blocage des accès aux grandes surfaces ou encore des manifestations dans les rues d’un grand nombre de villes dans le pays. Pointées du doigt tous les ans au moment de l’augmentation des leurs tarifs, les sociétés d’autoroutes ont de nouveau été la cible de nombreuses critiques. Des actions plus ou moins pacifiques ont touché les autoroutiers pendant le mouvement :

  • « Barrières ouvertes » : de façon plus ou moins intensive selon les régions de France, l’ouverture des barrières par les manifestants a permis aux automobilistes de circuler librement sur certaines autoroutes sans s’acquitter du péage.

  • « Dégradation des équipements » : le vol ou la destruction des équipements sur certaines gares de péage par des casseurs.

  • « Incendie des infrastructures » : la destruction totale ou partielle de gare de péage, de véhicules de services ou de bâtiments d’exploitation, principalement dans le sud de la France, par des incendiaires.

 

Ce type d’opérations a des conséquences matérielles et financières importantes pour les exploitants autoroutiers qui sont encore difficiles à évaluer, mais s’élèverait déjà à plusieurs centaines de millions d’euros d’équipements à renouveler et de recette non perçue. L’impact humain est également important pour les agents qui ont vu leurs outils de travail partir en fumée.

 

D’autres solutions de mobilité, notamment routières, voient le jour en France et pourraient permettre d’apporter des réponses aux problématiques sociales et environnementales, comme par exemple :

  • Le péage positif : contrairement au péage classique, ce nouveau dispositif permet de récompenser les automobilistes qui ont un comportement vertueux d’un point de vue environnemental (privilégier le covoiturage, éviter de prendre sa voiture aux heures de pointe, favoriser d’autres modes de transport plus « doux », etc.). Ces récompenses peuvent être d’ordre financier ou sous forme de services offerts.

  • Les voies réservées au covoiturage : positionnées sur les axes congestionnés, ces voies doivent permettre de réduire le nombre de véhicule en circulation en incitant au covoiturage. La vitesse moyenne sur ces voies aux heures de pointe est également supérieure, l’intérêt est donc double pour les covoitureurs. De nombreux services se créent autour de cet usage qui permettent aux automobilistes de s’y retrouver financièrement.

  • Le péage freeflow (« flux libre » en français) : cette forme de péage sans barrière existe depuis de nombreuses années à l’étranger et permet notamment de décongestionner les gares de péage, tout en déployant des infrastructures plus légères que les gares de péage existantes. De nombreuses expérimentations sont en cours en France avant d’envisager un déploiement à plus grande échelle sur le réseau autoroutier.

  • Les plateformes multimodales : de nombreuses études sont menées par les collectivités et les opérateurs privés pour voir comment rendre la mobilité plus fluide, dans et aux abords des grandes agglomérations. Ce type de plateformes (ou « hub ») permettrait de créer de nouveaux espaces où les voyageurs pourraient passer d’un mode de transport à l’autre sans effort et donc les pousser à moins utiliser leurs voitures. Situées en périphérie des villes, elles regrouperaient des espaces de stationnement, des gares routières et ferroviaires et pourquoi pas des espaces de travail.

 

Ces projets sont des illustrations de ce qui pourrait émerger en France pour faciliter la mobilité dans les zones urbaines, périurbaines et rurales. De plus en plus, la mobilité des personnes et des marchandises a vocation à être multimodale et constituer un service intégré. Ces projets sont complexes à mettre en œuvre parce qu’ils nécessitent une vision de la mobilité au sens large qui couple différents modes de transport, des solutions techniques innovantes, des problématiques d’urbanisme, etc.

Les principales problématiques résident dans la capacité à faire converger les visions des acteurs publics et privés impliqués dans ces réflexions, trouver des modes de financement où tout le monde trouve son compte (citoyen, collectivités locales, acteurs privés) et définir le cadre légal qui prévient toute forme de dérive.

 

Les sociétés d’autoroutes travaillent déjà au développement de ces nouveaux modes d’organisation de la mobilité et il y a fort à penser qu’elles auront un rôle clef à jouer.

Dans les mois à venir, la loi d’orientation des mobilités (LOM) doit ouvrir des pistes sur ces sujets. Ce sera peut-être l’occasion de favoriser ces projets de mobilité et d’apporter une vraie alternative aux français pour leurs déplacements. Loin d’apporter des solutions à toutes les revendications des gilets jaunes, cela apporterait au moins un début de réponse aux besoins de mobilité des français et à l’exigence collective d’une meilleure prise en compte des problématiques environnementales.