Illustration Commission européenne

Directive sur l’interopérabilité des systèmes de télépéage : une refonte partielle et inéquitable

En mai dernier, un groupe de travail de la Commission Européenne a présenté une proposition de refonte de la directive 2004/52/CE sur l’interopérabilité des systèmes de télépéage. Le texte apporte également des précisions à la décision 2009/750/CE qui définit les rôles des différents acteurs du Service Européen de Télépéage.

 

Les auteurs dressent en premier lieu un constat critique de l’interopérabilité du télépéage en Europe, en affirmant que les objectifs fixés par la directive 2004/52/CE n’ont été que trop peu atteints : en effet, il n’existe pas encore à ce jour de réel marché européen du télépéage mais seulement un ensemble d’acteurs nationaux chargés de collecter le péage sur des territoires donnés (les « Single Service Provider », comme Toll Collect par exemple en Allemagne). La proposition émet plusieurs explications à l’origine de cette situation, dont la principale reste très certainement les importantes barrières à l’entrée rencontrées par les prestataires du SET pour accéder au marché européen : les procédures d’agrément imposées par les Etats membres s’avèrent particulièrement longues et fastidieuses, d’autant plus que celles-ci sont hétérogènes et imposent parfois des exigences incompatibles avec une vision harmonisée du télépéage européen.

Le groupe de travail de la Commission européenne s’étend ensuite sur ce qui apparait finalement comme la problématique centrale ayant motivé cette proposition : l’absence de législation commune sur la politique de contrôle-sanction des véhicules et redevables contrevenants. Le texte met en avant le défaut de base juridique au niveau de l’UE qui empêche les Etats membres d’identifier l’auteur d’une infraction à partir du numéro de la plaque d’immatriculation lorsque le véhicule est immatriculé à l’étranger. La perte de recette qui en découle est estimée à 300 millions d’euros par an.

 

Ainsi, le groupe de travail présente trois axes de réflexion génériques afin de remédier aux différentes difficultés présentées ci-avant :

  1. Laisser les Etats membres autoréguler le marché du SET tout en apportant une législation commune ;
  2. Légiférer sur l’ensemble du périmètre du marché dans la continuité de la décision 2009/750/CE ;
  3. Apporter une harmonisation technique et procédurale aux systèmes de télépéage.

 

Après analyse coûts contre bénéfices, le groupe de travail a opté pour la deuxième approche.

 

Ainsi, sont donc présentés comme principaux changements à la directive 2004/52/CE :

  • La définition d’un nouvel objectif central : la facilitation de « l’échange transfrontière d’informations relatives aux défauts de paiement des redevances routières dans l’Union» ;
  • L’élargissement du périmètre de la directive aux systèmes de télépéage autres que ceux nécessitant un équipement embarqué, essentiellement aux systèmes de tarification de la congestion (péages urbains) et de reconnaissance automatique des plaques, utilisés pour les péages dits « free flow» ;
  • La promotion des équipements embarqués utilisant la technologie européenne de localisation par satellite Galileo (système complémentaire et concurrent du GPS américain ou du GLONASS russe) et le système de précision EGNOS associé ;

 

En conclusion, si la Commission européenne dresse un constat avisé sur la situation du SET et de ses prestataires, notamment concernant l’absence de réelle interopérabilité des systèmes de péage, la réponse apportée n’y répond que partiellement. En effet, en l’état des propositions de la Commission européenne, il est difficile de dégager une véritable volonté d’abaisser les barrières à l’entrée pour les prestataires du SET qui souhaiteraient être accrédités auprès des Etats membres.

La proposition vise avant tout à faciliter le contrôle-sanction et le recouvrement à l’échelle européenne, ce qui finalement, sécurise avant tout les « Single Service Provider » nationaux et risque de renforcer leur position dominante au détriment de la concurrence et de l’interopérabilité.